LA BOXE KHMERE
La Boxe Khmère : d'hier à aujourd'hui
Le Prodal serey (boxe libre ou boxe khmère) est une discipline codifiée au Cambodge par l’administration coloniale française, au début du XXe siècle, durant le protectorat. A cette époque, toutes les boxes d’Asie du Sud-Est seront codifiées via le même procédé. Le Prodal serey ou Prodal boran (boxe ancienne) vient du Kun daï (« art du combat à mains nues »), discipline militaire de corps à corps, en usage dans les armées de l’Empire khmer au IXe siècle. Le Prodal serey est proche du Bama lethwei (Birmanie), du Muay thai (Thaïlande) et du Muay lao (Laos)
« Les thaïlandais ont le mérite d’avoir fait connaitre et promouvoir cette forme de boxe qu’elle soit d’origine thaï ou khmère. Elle reste, sans contestation possible, le plus efficace des sports pieds-poings.
Techniquement, la similitude est plus que frappante. Il est difficile de différencier la boxe thaï de la Boxe Khmère. Pour nous, ces deux formes de boxes ont bien une origine commune. De nombreux points communs subsistent, la boxe khmère est structurée de manière identique à l’organisation thaïlandaise, camps d’entraînement, accompagnement musical lors des combats, Kun Kru (rituel de danse). Nous sommes bien en présence de disciplines similaires, aux techniques identiques, enseignées dans deux pays différents dans deux pays voisins. Cependant, la façon de combattre diffère un tant soit peu. En Boxe khmère, l’usage des techniques de coudes est plus employé et l’arbitrage favorise d’avantage les engagements au corps à corps, ce qui n’est pas le cas en boxe thaï ou le corps à corps est plus facilement sanctionné car peu spectaculaire. Le « low kick » est très utilisé en boxe khmère, alors que l’on préfère le « middle kick » en boxe thaï, qui est mieux primé au marquage par les juges.
Aujourd’hui au Cambodge, dans toutes les provinces les clubs se multiplient, de plus en plus de jeunes cambodgiens pratiquent ce sport. Des boxeurs exceptionnels, véritables ambassadeurs de la boxe cambodgienne, participent au développement de cette popularité. Bird Kham qui a accumulé de nombreuses victoires, le très spectaculaire Keo Rumchong, sans oublier Eh Phutong, champion incontesté et idole de toute une population avec pour palmarès 250 combats et seulement 20 défaites.
[…] En tant que sport de combat, la boxe khmère autant que la boxe thaï présente une véritable efficacité. Il y a plusieurs raisons qui justifient cela :
- Les techniques utilisées sont le fruit d’une sélection qui s’est faite à travers des milliers de combats. Autant dire que leur efficacité n’est plus à démontrer.
- L’utilisation de ces « huit armes » développe un répertoire gestuel très varié permettant de faire face à de multiples situations.
- Les techniques sont simples (donc facile à apprendre) elles se combinent en enchainement d’attaques ou de défenses qui sont répétés jusqu’à devenir une action automatisée.
La Boxe Khmère au CAMBODGE
Au début du 20ème siècle, la discipline présentait plus de risques qu'elle n'en comporte aujourd'hui. Les concurrents connaissaient bien évidemment les risques et les perdants pouvaient à peine prétendre être des victimes. A cette époque, les combattants portaient des bandages enrobés d’éclats de verre afin de blesser mortellement leurs adversaires lors des affrontements de Boxe Khmère dans la province de Battambang. Des gens combattent, encore aujourd’hui, pour subvenir à leurs besoins. En occident, l’on définit la Boxe Khmère plus comme un loisir qu’un labeur, la réalité est néanmoins différente dans les pays d’Asie du Sud-Est.
"Les boxeurs se sont battus jusqu'à la mort. Pendant le combat, un brancardier, équipé de sa civière, était présent près du ring pendant toute la durée du combat. L’on déposait le boxeur perdant dessus au cas où la mort venait à le frapper. De son côté le gagnant s’est vu décerné un prix par le Comité," raconté par « Yat, un des doyens du village dans la province de Battambang » dans un livre sur l'histoire sociale de la province (1974) qui souligne la vulgarisation de risques face à la mort.
Des décennies plus tard, Battambang et sa province voisine Banteay Meanchey, sont toujours le foyer de jeunes hommes déterminés, définis par un mélange de pauvreté et d’ambition, prêt à mettre les gants dans l’espoir de devenir professionnels.
Les morts sont nettement moins fréquents de nos jours. Mais la Boxe Khmère reste toujours un monde impitoyable. Le risque de blessures sérieuses (fracture, ouverture d’arcade, KO à retardement) est très élevé et peu rentable comparé à la compensation financière qu’elle offre.
"Ce n’est pas très différent de ce que l’on connaissait. Aujourd’hui encore, certains commencent à s’entrainer dans le but de devenir des combattants confirmés, et ainsi subvenir aux besoins de leur famille" dixit le coach Huot Hok originaire de Battambang, ancien boxeur des années 1940.
Même à 72 ans, il reste un sportif au physique et sens sportifs bien plus aiguisés que la plupart de ses cadets, même si des décennies les séparent. Au jour d’aujourd’hui, Huot Hok entraîne toujours des boxeurs et garde un œil attentif sur les combattants à fort potentiel, dans l’espoir de trouver la perle rare. « Les plus doués proviennent de Battambang et Banteay Meanchey » dit-il.
« Les boxeurs ayant acquis assez d’expérience et de renommée, peuvent combattre jusqu’à 3 fois par semaine. Les difficultés, c’est sur le ring qu’ils les rencontrent. » déclare Huot Hok, précisant que le nord-ouest rural de la province présente lui-même un terrain d’entrainement pour les combattants. « Les jeunes hommes issus des provinces rurale sont talentueux et puissants car ils n’ont pas d’argent à dépenser dans les femmes et l’alcool. Quand ils s’entrainent, ils s’entrainent sérieusement. » affirme Huot Hok.
« L’argent gagné lors des combats n’est pas suffisant, mais représente un soutien non négligeable » déclare Long Chey Sophal, 23 ans, titulaire de plus de 20 combats.
De retour à Phnom Penh, après 2 semaines de plantation de riz dans sa petite ferme à Sangke, un des districts de la province de Battambang, Long Chey Sophal dispose d’une semaine pour se préparer à son prochain combat diffusé sur la télévision locale.
Alternant entre travail à la ferme et combats de Boxe Khmère à Phnom Penh, Long Chey Sophal confesse « Le prix décerné au vainqueur est bien maigre mais parvient à aider ma famille »
« Ma femme me manque, mais nous avons besoin de cette argent » dit-il à propos de son combat, dont la somme en jeu est de 40$.
Les combats n’ont pas été mortels pour Long Chey Sophal. Ils lui ont juste valu 4 points de suture à la joue et 4 autres au niveau du crâne, une blessure ouverte provoquée par un coup de coude.
Long Kimsen, 24 ans, vétéran avec 50 combats à son actif, a été récemment suspendu pour deux mois, après qu’un arbitre l’ait soupçonné d’avoir délibérément simulé un K.O lors d'un combat particulièrement sensationnel avec l'étoile montante Svay Ritthy.
Clamant son innocence, Long Kimsen accepte cependant, que d'autres combattants soient tentés par l’appât du gain. "Certains boxeurs ont des enfants, ils ont besoin de cet argent, donc ils le font. Mais pour moi et ma réputation, je ne le faisais pas" confesse Long Kimsen.
« La plupart des combattants n'ont pas assez de ressources, pour joindre les deux bouts chaque mois en attendant leur prochain match de Boxe Khmère » confesse Long Salavorn, entraineur, qui fit ses lettres de noblesse à Phnom Penh dans les années 1990. Il dit avoir partagé sa petite maison en bois avec 10 combattants, étant vénus de provinces avoisinantes jusqu’à Phnom Penh dans le seul but de combattre.
« Nous n'avons pas beaucoup de promoteurs comme dans les autres pays. C'est pourquoi les récompenses sont minimes » dit Long Salavorn.
« La chose la plus importante est la condition de vie des boxeurs. Pour gagner assez d'argent, ils doivent compter sur la concurrence. S'ils tombent malades ou se blessent, ils doivent se tourner vers leur entraîneur pour demander de l'aide. Les Boxeurs occidentaux ont juste besoin de combattre une ou deux fois par an et peuvent se reposer. Ils perçoivent une énorme quantité d’argent » a déclaré Meas Sokry, Président de la Commission de Juge/Arbitre du Cambodge.
« Le Cambodge a maintenant plus de 100 clubs de Boxe Khmère, et plus de 300 combattants dans huit catégories de poids différentes » a déclaré Oum Yourann.
La Boxe Khmère en FRANCE
Aujourd’hui le Cambodge, la Thaïlande, la Birmanie et le Laos sont les 4 grands pratiquant de la Boxe Thaï. Néanmoins chaque style de Boxe est différent, même si l’on a l’habitude de regrouper le tout sous le terme de Boxe Thaï. Par exemple, la Thaïlande, le Cambodge et le Laos ont tous adopté une règlementation professionnelle et moins archaïque, aujourd’hui les combattants portent des gants. Ceci n’est pas totalement vraie pour la Birmanie, où subsistent encore des boxeurs montant sur le ring, armés uniquement de leur mental et de quelques bandages subsidiaires. Certaines provinces souhaitent conserver leurs traditions, au détriment de la sécurité des combattants.
La discipline en France se présente comme un sport mais aussi un loisir. Contrairement aux règles définies en Asie du Sud-Est, où la seule chose qui différencie les boxeurs est la catégorie de poids, La France, elle, a institué un nouveau type de classement règlementé pour ses boxeurs, bien plus stricte que ses homologues asiatiques. Ceci afin de renforcer la sécurité des pratiquants lors des combats.
Ci-dessous, quelques exemples tirés du règlement sportif de la FBKBASE (Fédération de Boxe Khmère et Boxe d’ Asie du Sud-Est):
- 1. Les niveaux d’expérience définis par un quota de points :
- Classe C : Amateur
- Classe B : Semi-professionnel
- Classe A : Professionnel
- 2. Les catégories d’âge (en années) :
- MINI POUSSINS : 6
- POUSSINS : 7-8
- PUPILLES : 9-10
- BENJAMINS : 11-12
- MINIMES : 13-14
- CADETS : 15-16
- JUNIORS : 17-19
- SENIOR : 20-34
- VETERANS : 35-44
- 3. Les catégories de poids (en Kg):
- PAILLE : Moins de 47.620
- MI MOUCHE: Moins de 48.990
- MOUCHE : Moins de 50.800
- SUPER MOUCHE: Moins de 51.500
- COQ : Moins de 53.520
- SUPER COQ: Moins de 55.340
- PLUME : Moins de 57.150
- SUPER PLUME: Moins de 58.900
- LEGER : Moins de 61.130
- SUPER LEGER: Moins de 63.500
- WELTER : Moins de 66.680
- SUPER WELTER: Moins de 69.800
- MI MOYEN: Moins de 72.500
- MOYEN : Moins de 76.200
- SUPER MOYEN: Moins de 79.380
- MI LOURD: Moins de 82.500
- LOURD : Moins de 86.180
- SUPER LOURD: Moins de 86.180
- 4. Les différentes formes de confrontation :
- L’ASSAUT : c’est une forme de rencontre qui oppose 2 boxeurs (de sexes, de poids, et d’âges différents ou non) et se juge à l’aide d’une triple notation qui tient compte de la maitrise technique, du style démontré par le boxeur et la précision des coups (dont toute puissance doit être exclue). Le port du casque, du plastron, des coudières, des gants, du protège-sexe, du protège-dents, des protège-tibias (avec dessus de pieds) est obligatoire pour les boxeurs. La gente féminine porte une protection supplémentaire : le protège-poitrine.
- LE CLASSE C AVEC PROTECTIONS (- de 16 ans) ou COMBAT EDUCATIF : c’est une forme de rencontre qui oppose 2 boxeurs (de même sexe, de même catégorie de poids et de même catégorie d’âge) et se juge à l’aide d’une triple notation qui tient compte de la maitrise technique, du style démontré par le boxeur et la précision des coups (dont toute puissance doit être exclue). Le port du casque, du plastron, du protège-sexe, du protège-dents, des protège-tibias (avec dessus de pieds) est obligatoire pour les boxeurs. La gente féminine porte une protection supplémentaire : le protège-poitrine.
- LE CLASSE C AVEC PROTECTIONS et SANS PLASTRON (+ de 16 ans) : c’est une forme de rencontre qui oppose 2 boxeurs (de même sexe, de même catégorie de poids et de même catégorie d’âge) et se juge sur la technique, la précision, l’efficacité des coups et la combativité des boxeurs. Le jugement est déterminé par une triple notation.
- LE CLASSE B : c’est une forme de rencontre qui oppose 2 boxeurs (de même sexe, de même catégorie de poids et de même catégorie d’âge) et se juge sur la technique, la précision, l’efficacité des coups et la combativité des boxeurs. Le jugement est déterminé par une triple notation. Seules les coudières, le casque, les gants, les protège-tibias (avec dessus de pied), le protège-sexe et le protège dents sont obligatoires. Les autres protections sont autorisées.
- LE CLASSE A : c’est une forme de rencontre qui oppose 2 boxeurs (de même sexe, de même catégorie de poids et de même catégorie d’âge) et se juge sur la technique, la précision, l’efficacité des coups et la combativité des boxeurs. Le jugement est déterminé par une triple notation. Seules les coudières, le casque, les gants, les protège-tibias (avec dessus de pied), le protège-sexe et le protège dents sont obligatoires. Les autres protections ne sont pas autorisées.